La meilleure manière d’acquérir des informations sur un domaine d’activité donné est de vous renseigner auprès de personnes qui y ont déjà acquis de l’expérience. Le principe est le même pour le téléphone rose.
Le hic, c’est qu’il n’est pas toujours évident de trouver une hôtesse à qui poser les questions qui vous taraudent l’esprit. Pétunia, animatrice de téléphone rose, a bien voulu accepter d’être interviewé. Découvrez tout sur sa vie d’hôtesse de tel rose.
Vous voulez bien vous présenter ?
Je suis Pétunia, c’est un nom emprunt. J’ai 27 ans et cela fait 8 ans que j’exerce le métier d’animatrice de téléphone rose. Officiellement, je suis docteur-pédiatre, mais à mes heures perdues j’anime des conversations sulfureuses avec des patients beaucoup plus âgés.
Comment est-ce que tout a commencé ?
Lorsque j’ai obtenu mon bac, je devrais commencer l’université. Seulement, mes parents n’avaient pas vraiment les fonds nécessaires pour m’envoyer dans une université. En ce temps-là, je faisais quelques petits jobs qui me permettaient, tant bien que mal, de me gérer… mon petit-frère aussi. Tantôt, j’étais une nounou pour enfants, tantôt pour chiots…
Ces petits boulots ne me rapportaient pas vraiment grand-chose.
Et à cette allure, je ne risquais pas de rassembler le pécule qu’il faut pour payer ma scolarité. Il me fallait donc trouver un travail qui me rapporterait assez. Mais je décourageais de ne rien trouver d’assez lucratif. Trouver un job convenable et bien payé avec le bac n’est pas chose aisée. J’étais donc sur le gril… Il me fallait trouver coûte que coûte un travail. Les travaux habituels n’étaient pas suffisamment payés. Espérer gros avec, juste un Bac, c’était mort.
Pour être franche, je n’étais pas non plus tentée de faire un travail qui me prendrait tout mon temps et pour lequel je serai rémunéré des miettes. Non merci ! Je me suis donc rendu sur le net et j’ai tapé dans Google : « Comment se faire de rapidement de l’argent depuis son domicile ? ». J’avais vu plein de proposition, rédaction web, community management, graphisme, trading, dropshipping, etc.
Cependant, il fallait, pour pouvoir faire ses jobs, des formations préalables. Il faut de l’argent pour se faire former. Argent que je n’avais pas. C’est toujours dans mes pérégrinations que je suis tombé sur une annonce de téléphone rose. J’étais un peu intriguée… J’avais saisi que ce serait un truc un peu fripon…
Alors, ce que j’ai fait, c’est d’essayer de glaner le plus d’informations que je pouvais trouver à propos.
J’ai cherché sur Wikipédia, Wikihow, j’ai tapé différentes recherches… Au bout de quelques jours, j’avais désormais toutes les informations sur le sujet. Je savais comment démarrer un business de téléphone rose, combien on pouvait gagner et comment être performante. J’étais un peu sceptique quant au gain qu’on pouvait se faire. Avec l’avènement d’internet, toutes les vidéos classées X qui foisonnaient sur le net, y a encore des gens qui paient pour parler sexe ?
M’étant bien renseigné, j’ai su qu’on pouvait rapidement se faire arnaquer si l’on n’est pas avisé. J’ai donc essayé de trouver des sociétés de téléphone rose de référence. J’en ai trouvé quelques-uns. Devinez ce que j’ai fait… eh bien, je suis allé sur leur site web. J’ai cherché les numéros fréquemment composés. Et j’en ai appelé un. C’est une belle voix qui m’a reçu. Je lui ai alors fait comprendre que je ne voulais pas de ses services.
Je lui ai plutôt fait comprendre que je voulais travailler comme elle. Vous vous en doutez, elle était étonnée. Elle a d’abord cru à un canular. Mais je l’ai convaincu, je lui ai parlé de ma condition. Elle m’a demandé mon âge, je lui ai dit que j’étais déjà mature, que j’avais 20 ans ; or, je n’en avais que 19. Selon elle, j’avais une voix assez belle et avec un peu de chance, je pourrais faire un carton.
Elle m’a donné certaines indications que j’ai suivies. J’ai finalement compris que j’avais tort. Il y a effectivement toujours des personnes qui sont prêtes à payer pour se faire écouter. En effet, tous les clients que j’ai reçus ne voulaient pas parler de sexe ou de choses coquines. Certains ne voulaient que parler avec une jolie femme. Beaucoup de préjugés entourent ce métier, mais il faut vraiment l’exercer pour se faire son opinion.
De quoi parlez-vous alors pendant les dials ?
Il est inutile d’ajouter que je ne connaissais aucune des personnes qui m’appelaient. Certains se permettaient de me parler un peu de leurs vies privées. Encore que je ne sais pas s’ils sont sincères ou pas. Cela dit, moi je m’inventais à chaque fois une nouvelle vie. Tantôt, j’étais Julienne, une étudiante, tantôt Paola, une hardeuse professionnelle. Je faisais varier les noms et les personnages.
Je me suis rapidement surprise à reconnaitre les voix de certains clients fidèles. De quoi parlions-nous ? De tout ce qui pouvait avoir rapport avec le sexe. Nous parlions de sujets coquins, fripons qui me faisaient parfois rougir à l’autre bout du fil. J’étais parfois dépassée par certains fantasmes trop bizarres. Il faut l’avouer, il y a vraiment des personnes « malades » qui circulent en liberté.
Excusez-moi… Mais, il fallait que vous sachiez à quoi vous attendre. Le principal travail d’une hôtesse de téléphone rose est d’exciter l’appelant, faire l’amour verbalement et s’écouter se masturber. C’est donc en gros ce que je suis amenée à faire. Comme je l’avais dit, il y a de ces jours où le client veut juste parler, du boulot, des voyages, faire connaissance… Il y en a même qui tente de me proposer des rendez-vous.
Il y avait un client-là que j’ai particulièrement apprécié. Son kif, c’était juste le dialogue. Il était très gentil avec moi. J’étais presque tentée de demander à ce qu’on se voie. Bref… la plupart de ceux qui appellent ne veulent qu’une seule chose, m’entendre avoir un orgasme. Certains n’étaient pas très à l’aise avec des filles et me demandaient conseil pour savoir comment séduire une fille ou comment mieux faire l’amour avec une femme.
Je préfère les clients plus âgés, les jeunes sont trop souvent obnubilés par le sexe. Pas tout le monde, mais la majorité. J’ai tellement de confessions, mais je ne pourrai pas toutes les sortir ici, désolé.
Selon vous, comment peut-on réussir en tant qu’animatrice de tel rose ?
Laissez-moi vous dire là qu’il n’y a pas 36 solutions, il faut aimer parler de sexe. Il faut vraiment, mais alors VRAIMENT avoir un esprit ouvert. Si vous remplissez cette condition, vous allez aimer être hôtesse de téléphone rose. Moi, c’est un sujet duquel je suis friand. J’adore les causeries salaces. J’adore montrer que mon côté torride, la bête torride qui sommeille en moi.
Ce que je trouve mignon par-dessus tout, c’est quand je sens que mon interlocuteur au bout du fil n’est pas aussi connaisseur que cela et que j’arrive à le surprendre lui aussi. Cela constitue des points en ma faveur. Cela ne veut pas dire que j’ai tout appris toute seule, j’ai découvert bien de choses grâce aux conversations. Vous ne serez jamais la même après avoir exercé en tant qu’hôtesse de tel rose.
Quelle est votre meilleure/pire expérience ?
Commençons par la première, ma meilleure expérience… Bon, souvent je simule les orgasmes, je gémis et je pousse des cris suggestifs et tout. Mais ce n’est pas vrai. J’ai, sans vouloir être condescendante, un bon talent d’actrice. Cependant, il y a eu une fois où lors d’un dial un homme a réussi à me faire jouir. Il avait une de ces voix… Viril, puissante… Je me suis surprise en train de me toucher et j’ai rapidement atteint l’orgasme.
J’ai failli réveiller toute la maisonnée. Cela me fait un peu rire à chaque fois que j’y pense. L’exciteuse excitée… Par contre, l’expérience qui a été moins intéressante, je ne dirai pas pire, est la fois où j’ai reçu un appel d’une femme. Elle a dit être mariée, mais ressentait une attirance pour des femmes. Elle m’a demandé des choses. J’étais terriblement gênée vu que c’était une femme. Mais cela reste une expérience.
Je ne sais plus si j’ai eu davantage de meilleures expériences que de pires. Sincèrement, certains appelants n’avaient pas une voix alléchante du tout. Et c’en était pénible. Il y a une grosse différence entre la vulgarité et les dialogues coquins. On peut être salaces et être soft, on peut parler de choses grivoises sans pour autant être vulgaire. Beaucoup ne savent pas cela. Il y a des éhontés qui se cachent derrière le combiné pour vomir toutes leurs cochonneries.
Quand cela me dépassait, je pouvais leur raccrocher au nez, j’en avais pleinement le droit. Sachez-le, en tant qu’hôtesse, vous n’êtes pas tenue de donner libre cours à toutes les bêtises que peuvent débiter vos clients. Vous pouvez — et devez — laisser le répondant avec des bips sonores dans les oreilles.
Est-ce qu’on y gagne vite et beaucoup d’argent ?
Patience et persévérance, tu auras ; et de l’argent tu auras. On peut résumer le salaire à cela. La rémunération varie entre 10 et 20 euros de l’heure. Parfois, les appels n’en finissent plus et des fois, vous désespérez d’en avoir. Même si l’on peut se faire beaucoup d’argent, et Dieu sait que j’en ai fait, cela n’est pas constant. Si vous parvenez à créer des liens avec les clients, à être efficace, ils ne manqueront pas de vous rappeler.
Soyez donc avenante, et aimez ce que vous faites, cela se ressent forcément dans votre prestation. C’est justement là le vrai challenge. Parvenir à être courtoise, même si vous avez passé une journée sel. Vous aurez à travailler votre voix pour y supprimer toute empreinte de colère ou d’exaspération. Vous acquérez de nouvelles compétences qui sauront vous servir dans votre vie réelle.
Quelle est, in fine, votre opinion propre sur ce métier ?
Il n’y a pas de sot métier. D’ailleurs, l’animation de téléphone rose n’en est pas un. Tous les préjugés qui l’entourent génèrent beaucoup de gênes pour les hôtesses. Il faut faire des cachoteries aux familles et aux amis. Se cacher pour prendre les appels… Il y a de ces jours où je ne suis pas d’humeur, et qu’un dial réussit à me remettre d’aplomb. Je dis merci à tous ces appelants que je ne connaîtrai sans doute jamais.
Je dis aussi un merci particulier à cette hôtesse qui m’a permis de m’initier dans ce secteur qui reste encore immoral pour beaucoup. Je pense que je vais bientôt arrêter pour me consacrer plus amplement à ma famille et mon mari. Eh oui, le tel rose a ses hauts et ses bas, mais il n’en reste pas moins un business passionnant.